Dans la suite du colloque réalisé mi-novembre au parlement Bruxellois, la DH a publié un article intitulé : « La position « dangereuse » de Bruxelles Environnement sur les frelons asiatiques: « Faudra-t-il qu’il y ait un mort pour qu’on bouge?« .
Voici le lien vers l’article original : https://www.dhnet.be/regions/bruxelles/2023/11/24/670-interventions-pour-des-nids-de-frelons-asiatiques-a-bruxelles-en-2023-le-ministre-alain-maron-doit-mettre-en-place-avant-le-printemps-2024-GWIPAKP7RVCWDG6Q5LTYJGQXDE/
Et son contenu ci-dessous :
La position "dangereuse" de Bruxelles Environnement sur les frelons asiatiques: "Faudra-t-il qu’il y ait un mort pour qu’on bouge?"
Les secours sont débordés et réclament des moyens : “c’est le même numéro qui reçoit des appels pour un infarctus et pour un nid.” Bruxelles Environnement promet un plan régional.
- Publié le 24-11-2023 à 07h00
- Mis à jour le 24-11-2023 à 09h23
Ils prolifèrent à Bruxelles et les secours sont démunis face à eux. Jeudi 16 novembre dernier, à l’initiative du député bruxellois Jonathan de Patoul (Défi) un colloque s’est tenu au Parlement bruxellois pour évoquer la question de lutte contre les frelons asiatiques. L’espèce se développe à Bruxelles selon les acteurs du terrain. Le Groupe F, une association de citoyens soucieux des conséquences de la prolifération du frelon asiatique, dénombre trois fois plus de nids entre 2022 et 2023 à Woluwe-Saint-Pierre. “Et cela devrait continuer d’augmenter pour arriver à 130” en 2024.
Selon les acteurs présents, la prolifération amène un risque pour la santé publique. En 2023, ils dénombrent à Bruxelles au moins deux piqûres ayant entraîné des cas de réactions allergiques aiguës nécessitant un transport vers l’hôpital. Le personnel communal et les travailleurs du secteur des espaces verts sont de plus en plus exposés mais ils ne sont pas les seuls. Il y a un mois, un nid est tombé en peine rue à Etterbeek devant une boulangerie, heureusement sans faire de blessé. Un autre cas, celui d’une personne victime de 15 piqûres, a aussi été référencé. En France, en un an, 17 personnes sont décédées suite à des piqûres de l’insecte. On estime que sans intervention, le nombre de nids peut tripler d’une année à l’autre.
1.1 tonne d’insectes
L’autre risque abordé lors du colloque est celui pour la biodiversité. Rien que sur Woluwe Saint-Pierre et ses alentours, avec 89 nids observés, on peut estimer que les frelons ont détruit 1.1 tonne d’insectes dont environ 600 kg d’abeilles mellifères (dans les ruches, donc semi-domestiquées) mais aussi quasi 500 kg d’autres insectes, sauvages cette fois, répartis parmi 180 espèces selon le Groupe F. Ces estimations se basent sur quantité moyenne de nourriture pour un nid de frelons. Cela n’inquiète pas tant Bruxelles Environnement qui estimait il y a quelques jours dans les colonnes du Soir qu’il n’y a “aucun élément qui suggère une incidence manifeste sur les populations d’insectes sauvages.”
Printemps névralgique
Une des solutions envisagées lors de ce colloque serait de piéger les fondatrices de nids, qui sortent au printemps pour se faire féconder et créer de nouveaux nids. Cela ne permettrait non pas d’éradiquer l’espèce mais de limiter son implantation. Le référent frelon de l’UNAF – Union Nationale de l’Apiculture Française- a pris la parole pour évoquer le cas d’une commune française qui a réussi à diviser par quatre son nombre de nids grâce à cette pratique. Une méthode qui ne fait pourtant pas consensus puisque le piégeage entraîne souvent la capture d’autres espèces non désirées. Mais selon l’intervenant, l’impact de ces pièges sur la biodiversité est infiniment moindre que celui de laisser les nids se développer et se nourrir. Cette solution est “compliquée à canaliser pour éviter les interventions inopportunes”, répond Bruxelles Environnement qui souhaite étudier l’impact du piégeage sur les autres espèces. “Il est nécessaire de valider les aspects scientifiques, d’identifier les modalités de mise en œuvre et de formalisation.”
Siamu en alerte
Le Siamu était également présent ce jeudi et a pu donner quelques chiffres. Une intervention, notamment lorsque le nid est difficilement accessible peut se chiffrer à 1000 euros. Sans compter les coûts de l’achat du matériel et de la formation des agents. En 2020, on comptait 20 interventions pour des nids de frelons asiatiques. Aujourd’hui sur 670 opérations en 2023 (on arrivera probablement à 800 d’ici la fin de l’année), 479 “seulement” ont mené à une extermination du nid.
”Il y a de nombreuses opérations inutiles notamment dues au fait que le nid, une fois traité, n’est pas retiré. Donc des personnes rappellent le 112 pour des nids déjà traités. Il n’y a pas de plan global en région bruxelloise” déplorent les intervenants. Selon ces derniers le piégeage et/ou des moyens dans la recherche de nids dès le printemps limiteraient la prolifération et donc les coûts à venir pour le Siamu qui annonce déjà qu’il faudra renforcer ses moyens sur la question si la situation continue. “C’est le même numéro qui reçoit des appels pour un infarctus et pour un nid. Cela mobilise des équipes qui pourraient être ailleurs et le dispatching est débordé avec plusieurs appels à chaque fois qu’un nid apparaît. Le service doit rester gratuit pour le citoyen. C’est un moyen d’encourager les signalements mais aussi d’être sûr que les fondatrices sont neutralisées ce qui n’est pas forcément le cas avec un opérateur privé qui pourrait avoir tendance à en laisser s’échapper pour garder du travail. La convention avec Bruxelles Environnement ne couvre même pas le coût du matériel.”
Et le capitaine Bernard Demarteau d’ajouter un tacle à Bruxelles environnement évoquant la position “dangereuse” de l’administration et l’accusant de ne pas s’attaquer réellement au problème.
Une stratégie avant le pic 2024
Après les échanges, le député Défi Jonathan de Patoul a réclamé que le “Ministre de l’Environnement mette en place avant le printemps 2024 un véritable plan de lutte intégrée avec des moyens concrets et adaptés qui limiteront la prolifération de cette espèce invasive. Il faut réduire le nombre de nids en amont, c’est ce qui nous coûtera le moins cher et sera le plus efficace pour la protection de la biodiversité ! Faudra-t-il qu’il y ait un mort lié au frelon asiatique pour qu’on bouge sérieusement”.
Bruxelles Environnement ne nie pas la réalité du problème est assure que “vu le nombre d’interventions en augmentation cette année, le SIAMU adapte ses approches en fonction de ses ressources et décide librement des priorités d’intervention en fonction des cas problématiques. La convention (entre BE et le Siamu pour la destruction des nids) devra donc être revue pour 2024, des contacts informels ont déjà été pris. Nous poursuivons également le monitoring et suivons l’évolution des connaissances et des pratiques de piégeage et de lutte pour affiner les recommandations. Des démarches ont déjà été entreprises pour préparer une stratégie régionale. Des réunions sont en préparation et les principaux acteurs seront contactés dans les prochaines semaines. Le plan devrait préciser notamment les modalités de monitoring des populations et de neutralisation des nids, définir les prérogatives des différentes parties prenantes (dont SIAMU et opérateurs privés) et établir les codes de bonnes pratiques (modalités du recours au piégeage, protocoles pour la localisation des nids, etc.). Une première table ronde est prévue mi-décembre. L’objectif est d’avoir des orientations stratégiques avant le premier pic d’interventions 2024.
Aujourd’hui les nids qui se révèlent avec la chute des feuilles arrivent en fin de vie et ne seront actifs que jusqu’aux premières gelées. La consigne est donc d’encoder la découverte de nids sur le site observations.be et d’appeler les pompiers pour les cas problématiques (risques pour la santé/sécurité).